Le collier étrangleur qui n’étrangle pas…

Disons-le clairement, cet engin est purement et simplement interdit en Suisse en mode « étranglement » (ce qui ne veut évidemment pas dire qu’il n’est utilisé nulle part — mais enfin, la législation s’est exprimée ce qui, à mon sens, est une excellente chose – parfois les lois doivent dépasser les mœurs pour les faire évoluer, justement). Cette interdiction a l’immense mérite de faire réfléchir le propriétaire à ce qu’il fait et aux décisions qu’il prend – ce qui est un grand  premier pas. Inutile de dire qu’elle concerne également l’épouvantable collier dit à « piques » (et, de manière générale, est interdit en Suisse,  tout ce qui inflige  la douleur et  la peur à l’animal) :-|

 

 

J’ai lu récemment sur Facebook un (mauvais) article sur la « bonne utilisation » du collier étrangleur qui, nous affirme l’article, « n’étrangle pas » – il « coulisse » (je vous laisse méditer sur cette importante nuance, un nœud coulissant est précisément le principe de la pendaison). Cette tentative de nier les faits par le biais de la manipulation des mots est symptomatique d’un léger malaise. En effet, les temps changent et bien des propriétaires désormais sont fondamentalement peu enclins à étrangler leur compagnon chien: les années ’60 sont loin derrière nous et les mentalités évoluent, lentement – surtout dans les pays latins d’ailleurs – mais elles évoluent. Un peu comme en politique, on cherche à gagner des adeptes chez ceux qui auraient tendance à basculer du côté de l’éducation dite « positive » (non violente), tout en ménageant ses aficionados de toujours. Un exercice périlleux à mon idée car, au final, on pond une prose qui n’a tout simplement aucun sens, pour personne.

S’il n’étrangle pas ce fameux collier, à quoi sert-il donc alors? A étrangler « un petit peu mais pas trop », en gros. Dans les grandes lignes, l’article nous informe qu’il ne s’agit pas de démonter les cervicales de votre chien ni de faire sortir ses yeux des orbites mais « d’assurer la sécurité » quand on a, au bout de la laisse, un « vrai chien » (comprendre de grand gabarit, agressif et non éduqué). Il assurerait la dite sécurité quand le chien s’élance pour manger un chat ou un passant…. un comportement qui se vérifie rarement au ralenti et dans le calme à ma connaissance, je vous laisse imaginer l’impact sur le chien en finalité 8-O

Arrêtons de prendre les gens pour des attardés : le collier étrangleur étrangle et inflige une douleur – et c’est bien de cette douleur dont certains « éducateurs » se servent – elle représente d’abord une punition (dite positive : à savoir on ajoute un élément aversif, la douleur), puis un renforcement (dit négatif : l’aversif disparaît quand le chien cesse de tirer). Le chien peut, éventuellement, se conformer à cette marche au pied pour se soustraire à une douleur (qui, soyez-en bien certains, si elle est minime n’obtiendra pas l’effet recherché et contraindra, fatalement, le propriétaire à augmenter encore et encore l’intensité et la fréquence de ses « petites saccades » – terme utilisé dans l’article). On se demande ce qu’il reste de cette « éducation » quand le chien est détaché? :roll:

Les choses ayant été éclaircies, ce qui m’interpelle moi c’est l’enthousiasme que suscite ce type d’article sur le public – les partages sont très nombreux, les « like » encore plus. Pour finir de fidéliser un certain public, on balance dans la soupe ce bon vieux concept du « chien roi » – dont l’absence m’aurait stupéfiée (mais je n’ai pas été déçue). Même combat que celui de l’enfant « roi » – qui, sans « bonnes-baffes-qui-n’ont-jamais-tué-personne » (un vrai et grand classique) ne saurait grandir équilibré (et voilà comment on justifie à ses propres yeux et à ceux des autres le fait de perdre les pédales, de perdre le contrôle de soi, de dévaluer le respect de l’autre). On n’en meurt pas d’une « bonne baffe » – on n’en meurt pas d’une « bonne saccade ». Si l’unique objectif dans une relation avec un être vivant est de lui laisser la vie sauve, la plupart des parents l’ont atteint (notez que de « bonne baffe » en moins bonne baffe, des enfants meurent sous les coups de leurs parents et, plus proche du sujet, on voit d’innombrables chiens blessés par leurs étrangleurs).

A ce sujet, une petite anecdote enfantine dont j’ai été témoin il y a une quinzaine d’années: mes enfants jouaient au « papa, la maman et les enfants » chez une voisine et, soudainement, il y a eu pleurs, cris et bouderie. En finalité, la petite voisine avait vigoureusement giflé une de mes filles « parce qu’elle était la maman » – nous a-t-elle informé, dépitée par notre intervention. Pas autant que sa mère, un peu honteuse, et encore moins que mes filles qui ont immédiatement décrété qu’elles ne « jouaient plus » 😕

Aux « likeurs » (oui, je sais, c’est très laid comme mot) de ce type d’article, j’aimerais poser quelques questions :

  • Êtes-vous vraiment convaincus que hors violence et coercition point de salut?
  • Êtes-vous vraiment convaincu que si votre chien dépasse les 20 kilos vous n’avez plus d’autre option que de lui infliger des douleurs et de le faire vivre dans la crainte d’un signal menaçant?
  • Pensez-vous sincèrement qu’une éducation respectueuse de l’intégrité physique et émotionnelle de l’animal concerne uniquement les bichons et les caniches?

La science de l’apprentissage et du comportement concerne tout ce qui est vivant : ce qui a été découvert sur les rats s’applique à la pédagogie de l’enfant, ce qui a été — dans des temps obscurs — vérifié sur des enfants (voir, encore une fois, l’effroyable expérience de Watson ou dite du « petit Albert » sur Google), s’applique aux animaux.

Ce qui nous différencie c’est le langage… et le clicker training apporte précisément ça, un langage commun, compréhensible, intelligible pour l’animal : « click » – c’est juste (et ta récompense arrive), pas de « click » – c’était pas ça (et pas de récompense). L’animal va essayer encore, parce que cette récompense, il la veut et, de récompense en récompense, la confiance se tisse, vous devenez une immense bonne nouvelle à vous tout seul, vos signaux (et non ordres) sont autant d’opportunités d’obtenir ce que le chien veut obtenir. Pourquoi le chien irait-il  l’encontre de son propre intérêt? Le chien est un sympathique opportuniste :-D

Non, nous ne sommes pas de « cookies pushers » – des distributeurs de bonbons à la va-comme-je-te-pousse, nous sommes des éducateurs qui savons précisément comment fonctionne l’apprentissage, des vérités inéluctables – que l’on soit capable de l’admettre ou pas.

et pourquoi voudriez-vous pourrir votre propre vie à tirer, étrangler, faire souffrir, faire de plus en plus mal à votre chien (que vous aimez, je vous le rappelle), le voir éventuellement vous craindre, avoir peur? Souhaitez-vous vraiment avoir un animal qui obéit uniquement par peur d’une douleur qu’il anticipe? Je peine à le croire.

N’achetez donc pas ces « outils » de douleur, jetez-les si vous en avez et, si votre chien tire en laisse parce qu’il ne sait pas (encore) faire autrement et dans l’immédiat, investissez dans un harnais dit « d’éducation » (ci-dessous) et – surtoutdans les services d’un éducateur compétent qui saura vous accompagner dans une vraie éducation – quelque chose de compréhensible et durable, qui ne vous laissera pas les yeux écarquillés le soir, avant de vous endormir, en train de vous demander pourquoi vous semblez avoir pris un chemin d’escalade dans la violence avec votre chien.

 

« La violence est le dernier refuge de l’incompétence ».  – Isaac Asimov –

Rédigé par Cynthia Edelman-Rota de MagicClicker

http://www.magicclicker.ch/collier-etrangleur-netrangle-pas/

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Dogspirit Education Canine Comportementaliste 06.23.62.50.40 Montpellier et environs Tatjana Cerabona - Educateur canin, spécialiste de la relation Homme-Chien

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