Est-ce que votre chien est félicité pour ne rien faire ?

Féliciter son chien pour ne rien faire ne signifie pas qu’il faut encourager votre chien à ronfler dans son panier… même si certains chiens n’y verraient aucune objection ! Cet article vous parle d’un type de signal visuel qu’envoient les chiens et qu’il faut renforcer, c’est-à-dire clairement marquer au bon moment, et à chaque fois qu’il se produit, dans le but qu’un chien comprenne que c’est ce qu’il faut faire.

Malheureusement, ces signaux sont les moins visibles pour nous.

Quand il y a un conflit

Lorsque vous avez l’impression que votre chien ne réagit pas, ce n’est pas par hasard. C’est intentionnel. Ce dont nous parlons se produit lorsqu’il n’y a aucun conflit. Alors définissons le « conflit ». Il y a conflit pour votre chien lorsqu’il veut quelque chose de la part d’un autre chien, d’un autre animal, d’une personne ou d’un objet même, mais il y a une sorte d’antagonisme.

Cela peut être un chien qui voit un bout de jambon tomber par terre et son maître qui fait un geste de la main pour lui indiquer de ne pas bouger. Imaginons que le chien remue la queue. Il envoie un signal d’apaisement : il y a un conflit et il veut maintenir la paix. C’est un petit signal, approprié au petit conflit. Il n’y a pas lieu d’en faire plus, par exemple, rentrer la queue entre les pattes arrière et baisser la tête en mettant les oreilles en arrière. Ce serait exagéré et préoccupant.

Un conflit, cela peut être un chien qui, lorsqu’un autre chien de la maison s’approche de lui alors qu’il est couché aux pieds de son maître, lui-même assis dans son fauteuil, redresse les oreilles, lève la tête puis se met debout. Il envoie un signal de menace. Il dit « pour que nous restions en paix, ne t’approches pas plus ». C’est préoccupant parce que ce chien-là, il a appris qu’intimider est utile pour avoir ce qu’il veut – et parce qu’il n’y a pas lieu de menacer l’autre chien.

Un conflit, cela peut être quelqu’un qui avance la main pour caresser un chien et ce chien baisse la tête, met les oreilles très en arrière et rentre la queue entre les pattes arrière. Il envoie un ensemble de signaux d’apaisement intenses alors qu’il n’y a même pas de véritable conflit. Ce chien-là, il n’a probablement pas appris qu’une caresse est une bonne intention.

Bref, les chiens envoient une grande variété de signaux pour une grande variété de raisons dans toutes sortes de situations conflictuelles (ou pas). Certains se montrent intimidants, d’autres apaisent les tensions. Il y a aussi des chiens qui prennent de la distance. Il y en d’autres qui attaquent.

Mais heureusement, il y a des situations dans lesquelles il n’y a aucun conflit. Dans ce cas, les chiens n’ont ni besoin d’intimider, de fuir ou d’attaquer. Ils n’envoient pas non plus de signaux d’apaisement. Alors que font-ils ?

Rien.

En apparence seulement !

Quand votre chien coopère

Les études sur le comportement du chien parviennent aujourd’hui à des conclusions très similaires : il faut renforcer les comportements désirés.

Dans l’esprit des gens, cela se fait en créant des contextes spécifiques pour apprendre des comportements spécifiques. Si tu arrêtes de sauter, je te donne ta balle. De nombreuses personnes pensent aussi aux ordres, qu’il faut répéter afin qu’ils soient acquis : couché, récompense, couché, récompense…

C’est le renforcement positif, très bien, d’accord. Mais cela doit aussi concerner les comportements que les chiens ont naturellement. Personne ne leur dit de faire ceci ou cela. Le problème, c’est que comme il n’y aucun conflit, les chiens n’envoient pas de signaux visuels flagrants comme certains signaux d’apaisement ou de menace. Quand vous voyez votre chien détendu qui semble ne rien faire de spécial, il y a de grandes chances qu’à tout moment, il vous envoie un type de signal qui n’appartient pas à la grande famille des signaux de conflit.

Prenons un exemple. Si, parfois, il y a un petit signal d’apaisement quand vous caressez votre chien, il est de la plus haute importance de féliciter à chaque fois qu’il n’y a aucun signal. Parce qu’il y en a quand même un. C’est juste que vous ne le voyez pas parce que vous ne le connaissez pas. Peut-être parce que la grande tendance de ces dernières années, ce sont les signaux d’apaisement et basta tout le reste.

A partir du moment où le chien est en mesure d’envoyer un signal visuel – parce qu’il y a contact visuel – ne rien faire, c’est coopérer.

Avec vous, avec vos autres chiens, avec vos autres animaux, avec l’aspirateur, avec le cycliste qui passe devant lui… Heureusement que les chiens ne communiquent pas que quand il y a un conflit !

Pour certains chiots qui partent dans la vie avec des compétences sociales médiocres, coopérer doit être marqué par des félicitations répétées et toujours les mêmes. Il faut les aider à comprendre que coopérer est gratifiant. Etre caressé par exemple, n’est pas naturellement gratifiant en soi pour certains chiens (apprécier les caresses, c’est quelque chose que les chiots commencent à apprendre très jeunes). Beaucoup n’ont jamais été caressés par des enfants par exemple, ou bien des enfants d’un certain âge, ou bien ils ont été rarement caressés par des hommes et presque uniquement par des femmes. Ainsi, se laisser caresser par des enfants ou par des hommes quand ils sont chez vous, est un remarquable comportement de coopération et si personne ne leur fait comprendre que c’est ce qu’il faut faire, certains peuvent peu à peu apprendre que l’autre comportement qu’ils ont parfois – peut-être baisser la tête, peut-être s’éloigner, peut-être attraper la main, etc. -, est utile.

La plupart des gens réagissent quand un chiot leur attrape la main.

Mais il est bien plus productif de réagir quand le chiot coopère : un chiot ne peut pas apprendre ce qui est bien si on marque uniquement ce qui n’est pas bien !

Quand c’est trop tard

Lorsqu’un chien laisse un autre chien se coucher près de lui, c’est une scène a priori anodine mais en réalité, les deux chiens sont en train de communiquer. La façon dont le chien s’est approché, et plein de petits détails, ont permis au chien déjà couché de comprendre qu’il n’y a pas de conflit. Ce chien déjà couché n’a pas eu à envoyer de signal quelconque qui aurait donné envie à l’autre chien d’aller se coucher ailleurs.

Pouvoir saisir ces instants de pleine coopération et féliciter son chien est essentiel quand il y a quelques situations conflictuelles.

Parfois, il faut ruser pour que cela se répète au quotidien car bien sûr, le faire une fois de temps en temps ne suffit pas. Également, une friandise de récompense peut accélérer le processus.

Il y a néanmoins des cas où féliciter son chien pour ne rien faire, c’est trop tard. Vous avez beau répéter tous les jours, vous êtes devenu assez doué en langage canin, vous savez repérer les fameux signaux… et il n’y a aucune amélioration depuis des mois ! Cela se produit quand le chien a appris que certains comportements lui sont utiles et il a atteint un tel niveau, de peur (signaux d’apaisement ou fuite) ou d’agressivité (menaces ou attaques répétées) qu’il ne suffit plus de renforcer la coopération.

Il faut un travail plus pointu pour modifier certains comportements et certaines émotions.

Par exemple, certains chiens ont beaucoup de mal à communiquer avec leurs congénères. Ils se montrent violents presque à chaque rencontre. Peut-être que vous avez encore des opportunités de voir votre chien coopérer par exemple, en se laissant renifler sans se raidir outre-mesure mais le problème n’est pas le petit nombre d’opportunités de féliciter. C’est surtout que le chien a eu largement le temps d’apprendre la meilleure façon de se comporter dans certains contextes. Il a appris que coopérer est le moins utile. Il a constaté maintes fois qu’attaquer est utile.

Alors, non seulement il faut lui apprendre que coopérer est plus gratifiant qu’attaquer mais en plus, il faut lui apprendre qu’il n’y a pas lieu d’attaquer. Ce n’est plus du tout la même chose que d’apprendre à un chien que coopérer est gratifiant !

Quand c’est risqué

Et puis quelquefois, les chiens coopèrent tout en étant dans le doute. Par exemple, un chien couché sur son coussin laisse un autre chien se coucher sur une couverture juste à côté, mais il semble se raidir tout en levant la tête. Faut-il féliciter ce chien qui coopère un peu, tout en envoyant quelques signaux de menace ? Il vaut mieux attendre l’instant où le chien a reposé la tête sur son coussin, si cela se produit ou profiter d’une autre occasion où vous serez plus sûr de vous. Si vous n’êtes pas sûr, c’est que votre chien lui-même n’est pas sûr de savoir quoi faire.

Il arrive que les signaux de coopération soient plus nombreux et/ou plus forts que d’autres signaux. Il est alors souvent possible de renforcer le bon comportement. C’est le cas de toutes petites peurs que l’on peut souvent modifier (mais pas du jour au lendemain). Sinon, il faut un apprentissage plus pointu. Par exemple, on peut féliciter un chien qui se laisse caresser en baissant un peu la tête : à force de répéter, possiblement le chien apprend que c’est bien de se laisser caresser. Mais si un chien baisse beaucoup la tête en mettant les oreilles en arrière aussi, là c’est trop de signaux intenses comparé à la coopération.

Il est bien moins probable que féliciter son chien pour coopérer suffise.

PS : les descriptions ne sont que de vagues exemples, dans la réalité c’est plus compliqué; un chien a mille autre façons de se faire comprendre que baisser la tête ou les oreilles.

Pour conclure

Votre chien fait des choses fabuleuses quand il est détendu et qu’il n’y a aucune sorte de situation conflictuelle. Qu’il y en ait parfois ou qu’il n’y en ait jamais (ça, c’est très important si vous avez un chiot parce que « jamais aujourd’hui », ne veut pas forcément dire « jamais de la vie »), il le fait intentionnellement. Il semble ne pas « réagir » mais il est en train de coopérer.

Pour cela, il envoie des signaux visuels mais c’est plus facile de remarquer un chien qui redresse la queue et la tête que de remarquer un chien qui reste détendu.

Pour de nombreux chiens devenus agressifs, ou très peureux, une mauvaise perception du langage du chien est (plus ou moins fortement) en cause – et pas la maltraitance.

Vous devez profiter de ces occasions qu’il a de montrer qu’il coopère pour faire comprendre à votre chien que c’est ce qu’il faut faire. Pour y arriver, il faut bien vous dire que le chien ne fait jamais rien par hasard.

Certains doivent aussi changer de point de vue pour apprendre à repérer ce que leur chien fait de bien et ne plus être focalisé sur le pas bien. Ce n’est pas facile quand on a un chien avec de nombreux problèmes de comportement mais il ne faut pas oublier que c’est à nous de créer des situations dans lesquelles il sera en mesure de réussir. Tous les chiens peuvent prouver qu’ils font de bonnes choses. Certains chiens n’ont simplement pas d’occasions de le faire.

Enfin, n’oubliez surtout pas que les chiens peuvent envoyer des signaux contradictoires au même moment. Il ne faut pas se tromper d’instant pour féliciter.

Et pour certains chiens, c’est trop tard. Même s’il vous reste encore pas mal d’occasions de « féliciter pour ne rien faire », ce n’est pas ça le problème. Chez certains chiens, certains comportements se sont tellement renforcés, ils ont tellement bien appris ce qui leur est vraiment utile (ce n’est pas forcément de votre faute), qu’il faut leur apprendre à faire autre chose et il est alors indispensable de générer d’autres émotions pour y parvenir. Il n’est pas « inutile » de féliciter son chien à certains moments mais cela ne suffit plus.

Article rédigé par Laetitia de Ouafmag

http://ouafmag.com/feliciter-son-chien-pour-ne-rien-faire/

 

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