Apprendre la solitude.

Nous sommes partis pour un assez gros article, commençons doucement avec un sommaire pour que vous puissiez naviguer plus facilement dans l’article.

1 – La solitude, ça implique quoi ?
2 – Apprendre l’indépendance pour rendre la solitude plus facile
3 – Banalisation de la solitude
4 – Gérer l’environnement pour offrir de bonnes occupations
5 – Activité quotidienne et avant la solitude

1 – La solitude, ça implique quoi ?

Le chien est un animal qui n’est pas spécialement doué pour vivre dans la solitude la plus complète. S’ils le peuvent, les chiens ont tendance à rester en groupe, même si ce n’est qu’en duo. Globalement, ils n’aiment pas voir un individu qu’ils apprécient partir et là, je parle autant des autres chiens qui vivent avec eux que des humains. Il faut parfois apprendre aux chiens à rester sans l’un des leurs.

Les chiens peuvent mal vivre la solitude même s’ils restent en petits groupes. Le problème peut être moins la solitude en elle-même que le départ d’un individu apprécié.

Une fois seul, le chien doit gérer ses émotions et donc potentiellement son angoisse mais parfois simplement son ennui, son envie de jouer,… et trouver des activités adaptées à sa situation. Quand il naît le chiot est une page vierge, que faire pour s’occuper, pour se calmer, pour se détendre lorsqu’il n’y a pas d’autres individus ? Il va devoir trouver par lui-même et le résultat peut être une grande source d’angoisse pour l’humain. Hurlement, destruction, malpropreté, automutilation, fugue, … Beaucoup de choses sont possibles.

2 – Apprendre l’indépendance pour rendre la solitude plus facile

Le premier exercice que je vous propose ne comporte pas de solitude. Il se fait pendant que vous êtes présent. L’un des problèmes qui va se produire durant la solitude, c’est que vous ne serez pas là pour proposer des activités, tenir compagnie ou même parfois rattraper les bêtises potentielles. Votre chien va devoir apprendre à se gérer lui-même, autrement dit, il va devoir être indépendant.

Avant d’aller plus loin permettons nous un petit détour. Votre chien ne peut pas être trop attaché à vous. Un attachement trop fort, ça n’existe pas. Tout comme il n’existe pas une amitié trop forte ou un amour trop fort. On n’aime jamais trop. Par contre, il existe des mauvais attachements, des amitiés nuisibles et des amours malsains. Ici ce n’est pas une question de « quantité » mais de tout ce qui se met en place autour. C’est une question de « comment ça s’exprime » par exemple.

Si je vous raconte ça, c’est parce que nous n’allons pas apprendre à votre chien à être moins attachés à vous. On ne va pas venir abîmer votre lien, ça n’aurait aucun sens. Par contre, nous allons mettre en place un environnement qui permettra à votre chien de faire des trucs pour lui-même de temps en temps. Les moments que vous passez ensemble seront toujours aussi riches, mais lorsque vous serez plongé dans un film ou en train de discuter au téléphone ou de faire je ne sais quelle activité, votre chien au lieu de s’ennuyer à côté de vous pourra réfléchir pour lui-même et décider de ce qu’il a envie de faire. C’est simplement une compétence supplémentaire que l’on va travailler. Cette compétence c’est exactement là-dessus que votre chien va devoir s’appuyer lorsqu’il sera seul.

Attention, en fonction de la configuration de votre habitat, il faudra adapter les choses. L’idée est toute simple : vous êtes dans une pièce et votre chien a tendance à rester à vue, c’est-à-dire que vous le voyez et surtout, il vous voit. Le mauvais réflexe que l’on peut avoir est d’appeler son chien dès qu’il sort de notre regard. Sait-on jamais, il pourrait être en train de faire une bêtise ? Peut-être, mais pour travailler l’indépendance, il va falloir accepter de laisser le bénéfice du doute à son chien de temps à autre.

Donc, on va préparer la maison en installant différentes activités potentielles. Par exemple, sur mon schéma j’ai installé un lieu de fouille (par exemple un tapis) remplis de friandises, un super lieu de couchage, un coffre à jouet ouvert et un autre jeu d’intelligence. Je fais tout ça hors de la vue de mon chien si possible ou en enchaînant assez vite les préparations pour qu’il ne puisse pas tout regarder, tout vérifier, tout utiliser en ma présence. Et nous voilà de retour dans la pièce vide d’occupation, peut-être sans notre chien s’il a décidé de rester à s’occuper d’une des activités proposées. Peut-être avec si c’était trop dur pour lui.

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Si vous désirez faire une mise en place quotidienne très facilement, on peut simplement poser la gamelle dans une autre pièce. Attention : les portes restent toujours ouvertes. Si votre chien a besoin de venir se rassurer en vérifiant que vous êtes toujours là, il peut. On ne va pas le contraindre à cette activité, c’est juste une opportunité qu’il peut choisir de prendre ou pas. Si faire plusieurs mètres c’est trop pour lui, vous pouvez rapprocher la gamelle de manière à ce qu’il soit juste de l’autre côté du mur et qu’avec un coup d’œil ou deux petits pas, il puisse se rassurer. On peut adapter les difficultés en éloignant tout doucement la gamelle. Si dans votre situation il faut commencer très près, ce n’est pas grave : allez-y progressivement et laissez votre chien prendre ses propres décisions.

J’en profite pour rappeler que la portion de nourriture peut-être concentrée dans une gamelle ou dispatchée dans différents objets en fonction de votre choix d’alimentation. La gamelle n’est pas la seule possibilité et ce n’est pas forcément la possibilité la plus pertinente.

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A partir de là, vous n’avez plus rien à faire, juste à vivre normalement. Pensez simplement à garder les portes ouvertes. On ne va pas encourager le chien à aller vérifier les différentes activités. Si vous voulez jouer avec lui, lui faire des caresses, etc, etc vous pouvez. Vivez comme vous en avez l’habitude. A un moment ou un autre de votre journée, vous allez sans doute faire un truc sans vous occuper de votre chien. Peu importe.

Votre chien peut décider de rester avec vous, même quand vous lisez attentivement des articles trop longs pour mieux le comprendre et gérer la solitude. Mais il peut aussi décider d’aller voir l’une des activités que vous avez installées. Comme les portes sont ouvertes, il peut revenir aussi souvent qu’il le désire pour se rassurer. Peu importe combien de temps ça lui prend, simplement essayer, c’est une bonne chose pour lui. S’il parvient à l’activité, il va se récompenser d’avoir fait quelque chose pour lui-même. Il va oser un peu plus facilement de tester, d’essayer, de découvrir bref : de vivre.

A terme, votre chien n’aura aucune difficulté à sortir de votre vue pour faire ce qui lui plait. Personnellement, pendant que j’écris ses lignes, deux de mes trois chiens ont rejoins un lieu de dodo très confortable qui se trouve à l’étage. Elles sont totalement hors de ma vue. Parfois elles y dorment, parfois elles jouent, parfois elles se font des papouilles. Régulièrement, elles descendent nous voir. Bref : elles vivent. Ça n’empêche pas que l’une d’elle aime faire la sieste sur mes genoux et qu’elles sont ravies de participer aux activités communes. Être à l’aise sans vous, ce n’est pas moins vous aimer.

3 – Banalisation de la solitude

La prochaine fois que vous partez je vous invite à observer attentivement votre rituel de départ, car nous en avons tous un. Prenons un exemple :

– Observer l’heure plusieurs fois d’affilés
– Se servir un verre et boire
– Passer aux toilettes
– Prendre son manteau
– Vérifier ses clés
– Prendre son sac
– Enfiler ses chaussures
– Vérifier s’il pleut ou pas dehors
– Ouvrir la porte
– La renfermer
– Tourner la clé dedans
– Partir

Peut-être qu’en plus de tout cela, vous prenez un moment pour préparer la solitude de votre chien en lui installant des objets ou en l’enfermant dans une pièce sécurisée ce qui peut être une excellente idée. Ce rituel peut comporter des caresses à son chien, un au revoir ou plein d’autres étapes.

Pour cet exercice, il est important que vous connaissiez parfaitement votre rituel. Prenez le temps de vous observer et d’observer votre chien. Potentiellement, à un moment donné, il comprend que vous êtes en train de vous préparer et il se met à stresser, il anticipe la solitude et peut déjà mal la vivre alors que vous êtes encore là.

Pour banaliser la solitude, nous allons chercher à la rendre réellement banale et donc non angoissante. Le jeu est tout simple à mettre en place. Nous ferons nos actions dans le désordre et nous allons faire pleins de « faux départs » et commencer très lentement à intégrer des solitudes de quelques secondes à peine.

En première intention, nous allons déjà banaliser le rituel de départ. Vous allez faire une partie de votre rituel, tout en restant finalement à la maison. Voici quelques exemples : je me lève et je vais regarder dehors pour vérifier s’il pleut, j’ouvre la porte et je la referme sans sortir pour autant puis je retourne à mes activités habituelles. Plus tard dans la journée, j’enfile mon manteau, j’attrape mon sac, puis je repose manteau et sac à leurs places. Plus tard encore, je déplace mes clés, je vais à la porte et je repose tout.

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Ce rituel que votre chien a peut-être appris à anticiper ne voudra bientôt plus rien dire, mais à ce moment-là, nous n’avons pas encore commencé à préparer la solitude. Nous allons inclure le fait de passer la porte, de la refermer et de s’éloigner. Le but du jeu est de ne pas provoquer d’angoisse, si votre chien pleure, gémis, aboie, c’est game over. Pour gagner, il faut donc fragmenter autant que possible nos étapes et commencer avec des durées extrêmement courtes. Vous pouvez par exemple franchir la porte, faire demi-tour et rentrer puis seulement la refermer. Vous pouvez fermer la porte et la rouvrir immédiatement. Vous pouvez fermer la porte, bouger vos clés et rouvrir sans avoir fermé à clé.

Sur ce genre d’exercices personne ne commence au même point. Peut-être avez-vous déjà réussi à atteindre : je me prépare, je sors, je ferme la porte et je vais jusqu’à ma boite aux lettres sans que mon chien n’angoisse. Ou peut-être avez-vous l’impression que partir du néant le plus total car votre chien angoisse dès que vous vous approchez de votre porte. Peu importe, il faut trouver son point de départ et commencer à jouer très lentement. On va inclure chaque difficulté l’une après l’autre et à force de faire des « faux départs » (qui peuvent vous conduire à quelques dizaines de pas de chez vous), votre chien ne s’en inquiétera plus.

Une manière de poursuivre ce jeu est d’augmenter très progressivement la durée des absences. Que vous partiez un dixième de seconde importe peu. On commence là où le chien ne stresse pas, on l’habitue à cette étape puis très lentement, on augmente. En cas de stress, il ne faut pas hésiter à recommencer avec une durée très inférieure pour repartir sur de bonnes bases.

4 – Gérer l’environnement pour offrir de bonnes occupations

A présent nous allons voir une autre partie de la solitude. Nous avons mis en place le jeu de l’indépendance pour aider le chien à se gérer lui-même pendant la solitude, nous avons également mis en place un jeu pour rendre cette solitude banale. Bien ! Mais que va faire le chien pendant qu’il est seul ? C’est à nous de le prévoir, au moins en partie. Peut-être qu’il va décider de dédaigner toutes nos propositions pour se faire une énorme sieste. Peut-être, oui, mais on ne va compter là-dessus. On va plutôt essayer de mettre en place un environnement riche, qui participera à sa dépense quotidienne que ce soit son besoin de dépense physique (en marchant tout simplement d’une activité à l’autre) ou son besoin de dépense mentale (en réfléchissant aux épineux problèmes que nous allons lui laisser) ou même son besoin exploratoire (en découvrant les odeurs, les formes, les textures que nous allons lui laisser).

Si nous composons un environnement assez intéressant, alors il finira par apprécier la solitude car c’est le moment où nous sortons tout ça. Notons qu’il est important de se renouveler dans les propositions afin de ne pas lasser et de faire varier les objets aussi souvent que possible. Intégrer un nouveau jouet de temps en temps et n’hésitez pas à le retirer régulièrement pour que le retrouver soit une vraie joie.

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Prenons une seconde pour parler de sécurité. Vous pouvez mettre des gaines autour de vos câbles ou faire une pièce sécurisée sans câble ou encore couper l’électricité de cette pièce. Pour les objets que vous allez proposer testez les d’abord en observant votre chien. Il détruit les peluches et mange la garniture ? Ne lui laisser pas une peluche. Il casse les bouteilles en plastique au risque de se blesser ? Ne lui laisser pas ça. En fonction de ce que fait votre chien vous pouvez vous permettre des choses différentes. La gestion des jouets est l’une des grandes difficultés.

5 – Activité quotidienne et avant la solitude

Enfin, terminons par la base. La solitude s’apprend mais au-delà de l’apprentissage votre chien va devoir gérer ses besoins au quotidien. En fonction des activités proposées ce sera plus ou moins simples pour lui. Il y a beaucoup de pièges à éviter. Prenons un exemple : durant la solitude votre chien va devoir s’occuper calmement. On peut avoir tendance à se dire que ce sera plus simple, s’il s’est défoulé avant (c’est vrai !). Cependant parmi les activités défoulantes, un certain nombre sont excitantes. Une fois excité votre chien va redescendre lentement vers du calme … et cette « descente » dans les émotions peut être très remuante.

Avant la solitude, certaines activités sont de bonnes idées comme :
– Les promenades
– Les jeux d’odorats
– Les rencontres canines zens

Et tous les sports que votre chien aborde dans le calme le plus absolu !

Du coup, n’oubliez pas, si ça coince vraiment, si vous êtes en difficulté et que vous ne vous en sortez pas, il va falloir chercher réellement la cause du problème, chose qui peut se faire avec l’aide d’un bon professionnel.

Rédigé par Céline de Hund.fr
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Dogspirit Education Canine Comportementaliste 06.23.62.50.40 Montpellier et environs Tatjana Cerabona - Educateur canin, spécialiste de la relation Homme-Chien

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